Parmi les diverses modalités d’exercice offertes aux notaires, la Société Civile Professionnelle (SCP) se présente comme une forme d’organisation avantageuse qui permet aux professionnels du notariat de mutualiser leurs compétences et de partager les responsabilités au sein d’une structure juridique spécifique.
L’office notarial, organisé sous forme de SCP, offre un cadre social propice à l’exercice collectif de la profession. Mais qu’en est-il de la cession de parts sociales au sein d’une SCP ? Qu’elle soit motivée par un départ à la retraite ou une réorganisation interne, cette cession soulève des questions d’ordre juridique et fiscal. Quelles sont les conditions, les étapes clés et les conséquences de la procédure de cession de parts dans une SCP de notaires ? Le Cabinet Bontemps répond à vos questions.
Les bases de la cession de parts au sein d’une SCP de notaires
Qu’est-ce qu’une SCP ?
La Société Civile Professionnelle est une forme juridique instituée par la loi du 29 novembre 1966. Elle permet aux membres d’une profession libérale réglementée (notaires, avocats, médecins, etc.) de s’associer pour exercer en commun leur activité.
Le principal objectif de la SCP est de mutualiser les moyens, les compétences et les risques tout en préservant l’indépendance des associés dans l’exercice de leur activité.
Les associés détiennent, dans la SCP, des parts sociales proportionnelles à leur apport. Ils jouissent par ailleurs d’un statut particulier : chacun d’eux est responsable de manière solidaire et indéfinie, sur l’ensemble de ses biens personnels, des dettes sociales de la société.
Les statuts de la SCP définissent le fonctionnement interne de la société, les modalités de prise de décision et les règles concernant la cession des parts sociales. Chaque associé titulaire de parts dans la société participe à la gestion de l’office selon les dispositions statutaires.
Quels sont les enjeux de la cession de parts de SCP de notaires ?
La cession de parts sociales dans une SCP de notaires peut être motivée par le départ en retraite d’un notaire, la volonté de réorganiser l’étude ou encore le choix d’intégrer un nouvel associé.
Les enjeux de cette démarche sont divers :
- valorisation des parts sociales en fonction de la valeur de l’office notarial, des revenus générés par la SCP et des actifs qu’elle détient ;
- agrément des associés selon des modalités fixées par les statuts de la SCP, destiné à préserver l’harmonie au sein de la société (dans certains cas) ;
- conséquences fiscales tant pour le cédant que pour le cessionnaire (imposition sur la plus-value et droits d’enregistrement).
Les étapes clés de la cession de parts en SCP de notaires
Préparation de la cession
La cession de parts de SCP doit être minutieusement élaborée.
Cette préparation consiste, dans un premier temps, à valoriser les parts sociales. Complexe, cette évaluation doit tenir compte de plusieurs facteurs tels que le type de clientèle, la localisation de l’étude ou encore ses performances financières.
Le titre de notaire associé et les droits qui y sont attachés font partie intégrante de cette évaluation.
Il est recommandé de faire appel à un expert indépendant pour réaliser cette valorisation, surtout en cas de désaccord entre associés.
En plus de la valorisation, il est indispensable de réaliser un audit financier complet de l’étude notariale sur la base de son chiffre d’affaires, des charges qu’elle supporte, et des revenus qu’elle génère. L’audit permet d’identifier les points forts et les faiblesses de la structure et donne au cédant et au cessionnaire une base solide de négociation.
Enfin, la recherche d’un repreneur est une étape délicate qui suppose un maximum de discrétion pour éviter toute perturbation au sein de l’étude telle qu’une perte de clientèle ou le départ de membres du personnel.
Les services d’un cabinet spécialisé peuvent s’avérer très utiles pour assurer une présélection rigoureuse des candidats et garantir leur adéquation aux critères financiers et opérationnels de l’étude.
Cession à un associé ou à un tiers : quelle différence ?
La distinction entre la cession à un associé ou à un tiers est essentielle dans la mesure où elle impacte non seulement la procédure à suivre mais aussi les délais et les coûts associés.
La cession de parts à un autre associé de la SCP ou à la société elle-même est peu formaliste. Selon les statuts, elle peut être libre ou nécessiter un agrément des autres associés et doit être déclarée au Conseil supérieur du notariat (CSN).
En revanche, la cession à un tiers extérieur à la SCP suppose presque toujours l’agrément des autres associés. Historiquement, cette démarche devait également recevoir l’approbation du Garde des Sceaux. Toutefois, le décret du 29 décembre 2022 applicable depuis le 1er mars 2023 a remplacé cette approbation par une simple déclaration auprès du Garde des Sceaux, accompagnée de l’acte de cession. Ce dernier dispose alors de deux mois pour s’opposer à la cession qui est réputée approuvée en l’absence de réponse dans ce délai.
Bon à savoir :
Le numéro d’identification de l’office doit être mentionné dans tous les documents relatifs à la cession.
Rédaction de l’acte de cession
Une fois la valorisation et la recherche de repreneurs achevées, l’acte de cession doit être rédigé avec soin.
Il doit comporter plusieurs mentions obligatoires :
- identité des parties ;
- description des parts cédées ;
- prix de cession ;
- modalités de paiement ;
- conditions suspensives éventuelles (agrément des associés, etc.).
Pour garantir la validité de l’acte, il convient de respecter les dispositions légales en vigueur et de s’assurer que la cession est conforme aux principes de justice et d’équité entre les parties.
Bon à savoir :
La transparence durant la phase de négociation est essentielle. Une communication claire entre le cédant et le cessionnaire permet d’éviter les malentendus et de conclure la cession dans des conditions optimales.
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Les conséquences fiscales de la cession de parts de SCP
La cession de parts dans une société civile professionnelle de notaires entraîne des conséquences fiscales pour le cédant, principalement sous la forme de l’imposition de la plus-value, c’est-à-dire la différence entre le prix d’acquisition des parts et leur prix de cession.
En France, la plus-value réalisée par le cédant est soumise à l’impôt sur le revenu, auquel peuvent s’ajouter les prélèvements sociaux. Cependant, des abattements pour durée de détention peuvent s’appliquer et réduire ainsi l’assiette imposable. Attention toutefois, ces dispositions fiscales peuvent varier en fonction de la situation spécifique de chaque associé et de l’activité de la société.
Le cessionnaire peut quant à lui être soumis à des droits d’enregistrement, généralement fixés à 5 % du prix de cession.
Bon à savoir :
Il est important de vérifier si la structure de l’office notarial inclut une holding, car cela peut avoir des implications fiscales spécifiques.
Étudier les conséquences fiscales de la cession avec l’aide d’un expert est conseillé pour éviter les pièges courants, maximiser les avantages pour les deux parties et optimiser la transaction.
La transformation de la SCP en SELAS ou SELARL
Pourquoi transformer une SCP en SELAS ou SELARL ?
La transformation d’une Société Civile professionnelle en une Société d’Exercice Libéral par Actions Simplifiée (SELAS) ou en une Société d’Exercice Libéral à Responsabilité Limitée (SELARL) peut, dans certains cas, être intéressante.
Ces formes juridiques permettent en effet une meilleure protection du patrimoine personnel des associés dans la mesure où leur responsabilité est limitée à leurs apports.
Les SEL offrent par ailleurs une plus grande flexibilité de gestion et d’organisation, et plus particulièrement la SELAS qui permet de dissocier la détention du capital de la gestion opérationnelle.
Cette transformation peut également se révéler avantageuse sur le plan fiscal, notamment pour l’imposition des bénéfices et des dividendes.
Les étapes de la transformation
- Réalisation d’un audit juridique et financier
Avant d’effectuer les démarches de transformation, un audit juridique et financier spécifique à l’activité notariale doit être réalisé afin d’évaluer la situation de la SCP. Il permet de s’assurer que la société respecte les obligations déontologiques et réglementaires propres à la profession et d’anticiper les ajustements nécessaires à la transition vers la SEL.
- Décision des associés
La transformation d’une SCP de notaires en SELARL ou SELAS nécessite, sauf disposition contraire prévue dans les statuts, l’accord unanime des associés. Cette décision est généralement prise lors d’une assemblée générale extraordinaire, où les résultats de l’audit sont présentés et discutés. La décision est ensuite consignée dans un procès-verbal qui servira de base pour les démarches administratives.
- Rédaction des nouveaux statuts
La transformation en SELARL ou SELAS implique la rédaction de nouveaux statuts conformes aux exigences des Sociétés d’Exercice Libéral. Ces statuts doivent inclure des dispositions relatives à la continuité de l’exercice des fonctions notariales, la gestion des actes notariés et la répartition des responsabilités entre associés.
- Obtention de l’agrément du Conseil régional des notaires
La SELARL ou SELAS nouvellement créée doit, pour poursuivre l’activité notariale de la SCP, obtenir l’agrément du Conseil régional des notaires. Cette demande d’agrément doit être accompagnée d’un dossier complet incluant les nouveaux statuts, le procès-verbal de l’assemblée générale décidant de la transformation ainsi que tout autre document requis par arrêté ministériel.
- Enregistrement auprès du greffe du Tribunal de Commerce
Une fois l’agrément obtenu, les statuts de la SEL doivent être enregistrés auprès du Tribunal de Commerce afin de conférer à celle-ci son existence légale et sa capacité juridique.
- Publication d’une annonce légale
Comme pour toute transformation de société, une annonce légale doit être publiée dans un journal d’annonces légales pour informer les tiers du changement de forme juridique. Cette publication est suivie de l’inscription de la transformation et des nouveaux statuts au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS).
La cession de parts dans une SCP de notaires est une opération complexe dont les conséquences doivent être strictement encadrées. Par ailleurs, les évolutions législatives et réglementaires et notamment les décrets et arrêtés du Ministre de la Justice peuvent impacter les modalités de cession et de transformation des sociétés notariales. Aussi, pour assurer une transition fluide et sécurisée, la procédure doit être anticipée et scrupuleusement respectée.
Pour éviter toute erreur, il est fortement recommandé de se faire accompagner. Le Cabinet Bontemps, spécialisé dans la transmission d’études notariales, vous offre une expertise solide pour mener à bien votre cession de parts ou vous aider dans votre transformation de SCP. Que vous envisagiez une telle démarche, que vous ayez déjà initié la procédure ou que vous ayez simplement besoin de conseils, n’hésitez pas à contacter nos équipes.