Comment les rémunérations techniques des associés des SEL sont-elles imposées ?

août 2024 | Notaires

Personne utilisant une calculatrice et un ordinateur portable pour faire des calculs financiers

Parmi les différentes formes d’exercice de leur profession, la société d’exercice libéral (SEL) permet aux notaires et aux avocats de pratiquer leur activité de manière indépendante tout en bénéficiant des avantages d’une organisation sociétaire. Le 15 décembre 2022, une mise à jour de la base BOFiP (Bulletin officiel des finances publiques) a introduit d’importants changements relatifs à la fiscalité des rémunérations des associés des SEL. Comment les rémunérations techniques des associés des SEL sont-elles imposées depuis lors ? Le Cabinet Bontemps vous répond. 

La société d’exercice libéral

La Société d’Exercice Libéral (SEL) est une structure juridique conçue spécifiquement pour permettre aux professions libérales, telles que les notaires, les avocats, les médecins, etc. d’exercer leur activité dans un cadre sociétaire. Elle combine les avantages d’une organisation collective avec ceux de l’exercice indépendant de professions réglementées.

Les SEL se déclinent en plusieurs formes juridiques, chacune adaptée à des besoins spécifiques et offrant des caractéristiques distinctes :

  • La SELARL (société d’exercice libéral à responsabilité limitée) permet de limiter la responsabilité des associés au montant de leurs apports. C’est la forme la plus courante pour les petites et moyennes structures.
  • La SELAFA (société d’exercice libéral à forme anonyme) est semblable à la société anonyme. Elle est souvent choisie par les structures plus importantes et offre une plus grande flexibilité en matière de financement et de gouvernance.
  • La SELAS (société d’exercice libéral par actions simplifiée) est appréciée pour sa grande flexibilité statutaire. Elle permet de moduler les droits et obligations des associés de manière plus libre.
  • La SELCA (société d’exercice libéral en commandite par actions) est moins répandue. Elle combine des associés commandités responsables indéfiniment des dettes sociales, et des commanditaires dont la responsabilité est limitée à leurs apports.

Pour les notaires et les avocats, le statut de la SEL représente une opportunité de structurer leur activité de manière efficace tout en facilitant la transmission et la pérennité de leur entreprise.

Impact des nouvelles mesures sur l’imposition des associés

Issues de la jurisprudence du Conseil d’État, la mise à jour de la base BOFIP de 2022 et les modifications introduites par l’actualité BOFIP du 5 janvier 2023, ont apporté des changements majeurs dans le traitement fiscal des rémunérations des associés des SEL perçues à compter du 1er janvier 2024 et déclarées en 2025.

Auparavant imposés dans la catégorie des traitements et salaires, les revenus tirés de l’activité libérale des associés personnes physiques des SEL soumises à l’impôt sur les sociétés sont désormais considérés comme des bénéfices non commerciaux (BNC).

Les revenus concernés

L’article 92 du Code Général des Impôts (CGI) précise que « sont considérés comme provenant de l’exercice d’une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n’ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus. »

Les rémunérations des associés de SEL peuvent être de deux ordres :

  • les revenus issus de l’exercice de leur profession au sein de la SEL qu’ils perçoivent en leur qualité d’associés ;
  • les rémunérations liées à leur mandat social.

Seules les premières sont concernées par la réforme, on les appelle les rémunérations techniques. Les secondes restent imposées, selon la forme de la société d’exercice, dans la catégorie des traitements et salaires ou de l’article 62 du CGI (assimilées aux traitements et salaires).

Le mode d’imposition

Avant cette modification, les rémunérations des personnes exerçant en SEL pouvaient, en fonction des activités, être imposées différemment. L’objectif est aujourd’hui de supprimer les disparités et d’harmoniser leur régime fiscal avec celui des autres professions libérales. Le législateur vise ainsi à simplifier la fiscalité des professions libérales et à mieux encadrer la déductibilité des charges, les modalités de déclaration et les régimes spécifiques applicables.

Dans la mesure où les rémunérations techniques des associés de SEL sont  incluses dans la catégorie des BNC, leur traitement en matière de TVA et de cotisations sociales est également modifié. Cela impacte directement le montant des impôts à payer ainsi que les obligations comptables et déclaratives des associés.

Les bénéfices non commerciaux peuvent être taxés selon deux régimes différents :

  • le micro-bnc (ou régime déclaratif spécial) qui s’applique automatiquement lorsque les recettes HT de l’année précédente ou de la pénultième année n’excèdent pas le seuil fixé par l’article 102 ter du CGI (77 700 euros). Le bénéfice imposable correspond alors au montant brut des recettes annuelles après un abattement forfaitaire de 34%.

Bon à savoir :

Pour déterminer ce seuil, il convient de retenir la rémunération versée par la SEL et, le cas échéant, « les dépenses professionnelles de l’associé acquittées en son nom et pour son compte par la SEL, au titre de l’année civile précédente et/ou de la pénultième année, qui auraient été déclarées dans la catégorie des BNC si elles avaient été perçues à compter de 2024 ».

  • le régime de la déclaration contrôlée, régi par l’article 96 du CGI, a vocation à s’appliquer en cas de dépassement du seuil ou si le contribuable en a expressément fait le choix. Il s’agit d’un régime dit réel qui permet de déduire du bénéfice imposable les frais professionnels effectivement engagés.

Les exceptions

La nouvelle règle d’imposition des rémunérations techniques dans la catégorie des BNC souffre deux exceptions :

  • S’il existe un lien de subordination du professionnel avec la SEL, les rémunérations techniques demeurent imposées dans la catégorie des traitements et salaires.

Attention :

Cette première exception ne joue pas en faveur du gérant majoritaire de SELARL qui ne peut se trouver dans un lien de subordination vis-à-vis de la société qu’il gère et dont il détient la majorité du capital.

  • Si les rémunérations techniques perçues par les gérants majoritaires de SELARL et les gérants de SELCA ne peuvent être distinguées des rémunérations de leur mandat social, elles restent imposées dans les conditions prévues à l’article 62 du CGI. Ces derniers peuvent prouver, par tout moyen, l’origine de ces sommes (activité libérale ou fonction de gérant). L’administration fiscale considère, en tout état de cause, que 5% de leurs revenus relèvent de l’article 62 du CGI.

Conséquences pratiques du nouveau mode d’imposition des rémunérations techniques des associés des SEL

Sur la comptabilité

La modification du régime d’imposition des rémunérations techniques des associés de SEL leur impose de nouvelles obligations en matière de comptabilité. Les associés doivent en effet adopter des pratiques comptables spécifiques à la catégorie des bénéfices non commerciaux.

Sous le régime de la déclaration contrôlée, ils doivent tenir une comptabilité rigoureuse, incluant :

  • un livre-journal qui enregistre de manière chronologique toutes les recettes et dépenses professionnelles ;
  • un registre des immobilisations et des amortissements ;
  • une déclaration fiscale annuelle (formulaire 2035).

Pour ceux qui souhaitent s’associer sous le régime micro-BNC, les obligations comptables sont en revanche simplifiées et se limitent à la tenue d’un livre de recettes.

Sur les charges déductibles

Dans le cadre du régime BNC, les charges liées à l’exercice de l’activité professionnelle telles que les cotisations de prévoyance Madelin, les frais de bureau, de déplacements professionnels, de formation, etc. peuvent être déduites à condition d’être justifiées.

Sur la TVA

Les rémunérations techniques des associés de SEL ne sont pas concernées par la TVA. Conformément aux articles 256 et 256 A du Code Général des Impôts, ces rémunérations ne sont pas soumises à l’obligation de facturation prévue par l’article 289 du CGI. En effet, la relation entre les associés et la SEL ne crée pas un lien de prestataire à client mais plutôt une collaboration interne à la structure sociétaire.

Ainsi, les associés de SEL ne doivent pas facturer la TVA sur les rémunérations techniques perçues de la société. Cela simplifie leurs obligations administratives et fiscales dans la mesure où ils n’ont pas à gérer la collecte et le versement de la TVA sur ces revenus.

Sur la cotisation foncière des entreprises

La Cotisation Foncière des Entreprises (CFE) est due par les personnes physiques ou morales exerçant une activité professionnelle non salariée. Dans le cadre d’une SEL, c’est la société elle-même qui est redevable de la CFE puisque l’activité libérale est exercée par la SEL en tant que structure juridique.

Toutefois, les associés peuvent être soumis à la CFE s’ils exercent une autre activité professionnelle indépendante en dehors de leur travail au sein de la SEL. En effet, la jurisprudence du Conseil d’État confirme que l’existence d’une activité professionnelle distincte, même partielle, peut entraîner une imposition séparée à la CFE pour cette activité spécifique.

Les changements récents relatifs à la fiscalité des rémunérations techniques des associés de SEL impliquent, pour les professionnels impliqués, une adaptation rapide. La nouvelle imposition dans la catégorie des BNC simplifie certaines démarches fiscales mais  impose, dans certains cas, des exigences comptables spécifiques. Dans ce contexte, il est indispensable pour les associés de SEL de se faire assister. Spécialiste de la transmission d’études notariales et de cabinets d’avocats, le Cabinet Bontemps se présente comme un partenaire de choix pour accompagner les associés concernés dans cette transition. N’hésitez pas à contacter nos experts pour bénéficier de conseils personnalisés en matière de cession entière ou partielle. 

Owner Buy Out (OBO) : pourquoi et comment racheter son propre office notarial ?

Avantages, étapes et précautions à prendre pour réussir un Owner Buy Out : le cabinet Bontemps propose un guide complet à destination des notaires.

Étude de notaire, CSN, OPM : décrypter l’écosystème notarial

Organisation, acteurs clés, enjeux, innovations et évolutions législatives : tour d’horizon de l’écosystème notarial français.

Partenariat AGANOT / Cabinet Bontemps

En juin 2024, l’AGANOT et le Cabinet BONTEMPS signent un partenariat pour conforter leur offre de service au profit des Notaires.

Cession de parts de SCP de notaires : tout ce que vous devez savoir

Enjeux, étapes, conséquences : le Cabinet Bontemps vous explique tout ce que vous devez savoir sur la cession de parts sociales dans une SCP de notaire.

Les bénéfices et limites du statut de notaire salarié

La sécurité de l’emploi et l’autonomie face au lien de subordination : découvrez les bénéfices et les limites du statut de notaire salarié.

Limite d’âge du départ en retraite du notaire : dispositions, conditions et préparation

Découvrez les règles relatives à l’âge de départ en retraite des notaires et les conseils du Cabinet Bontemps pour préparer une retraite sereine et optimisée.

Les 6 raisons qui font échouer la vente d’une étude de notaire

Découvrez les 6 principales raisons qui font échouer la vente d’une étude notariale et comment faire pour les éviter.

Comment faire exonérer les plus-values de cession d’étude notariale ?

Vous souhaitez optimiser la transmission de votre office ? Consultez notre guide complet sur l’exonération des plus-values de cession d’études notariales.

Définition et avantages du mandat exclusif de vente

Vous envisagez de céder votre office notarial ? Découvrez, avec le Cabinet Bontemps, le mandat exclusif de vente et ses nombreux avantages.

Quid de la libre installation des offices de notaires en 2024 ?

Évolutions récentes, opportunités et défis de la profession, découvrez où en est la libre installation des notaires en France en 2024.