Voici ce que tous les notaires doivent savoir avant de se lancer.
Des règles strictes pour la cession d’un office notarial
L’office notarial n’est pas une entreprise classique. Il s’agit d’une charge ministérielle, dont la cession est soumise à un contrôle rigoureux du ministère de la Justice. À ce titre, la vente d’une étude de notaire ne peut être librement effectuée : elle nécessite des autorisations officielles et l’intervention d’instances professionnelles telles que le Conseil Supérieur du Notariat (CSN) et les chambres départementales des notaires.
Un notaire ne peut céder son étude qu’à une personne remplissant toutes les conditions requises pour l’exercice de la profession : diplôme, expérience et agrément du garde des Sceaux. De plus, selon la structure juridique de l’office (exercice individuel, SCP, SEL, SPFPL), les modalités de transmission et les impacts fiscaux varient.
L’anticipation est donc essentielle pour réussir cette opération en toute sérénité.
Bon à savoir :
La nomination d’un notaire successeur n’est pas automatique, même en cas de reprise convenue de l’étude entre notaires. Le garde des Sceaux dispose d’un pouvoir discrétionnaire et peut refuser un candidat ne remplissant pas toutes les exigences réglementaires (article 7 du décret n° 73-609 du 5 juillet 1973).
Les étapes incontournables de la cession d’une étude de notaire
Voici les 4 principales étapes à connaître pour réussir la cession de votre étude de notaire :
1/ Évaluation et valorisation de l’office notarial
La première étape d’une cession réussie est l’évaluation de l’office notarial. Cette valorisation de l’étude est déterminée par plusieurs critères :
- La rentabilité de l’office notarial (chiffre d’affaires, bénéfices, passifs éventuels).
- La forme juridique de l’étude de notaire et la fidélisation de la clientèle.
- Le secteur géographique de l’office notarial et son potentiel de développement.
- Les actifs professionnels détenus par l’étude (biens immobiliers, matériel, outils numériques, etc.).
Un audit détaillé de l’étude notariale permet de fixer un prix réaliste et d’anticiper les éventuelles difficultés lors des négociations avec un repreneur.
Dans le cadre de la valorisation de votre étude de notaire, le Cabinet Bontemps en partenariat exclusif avec l’Association de Gestion Agréée du Notariat (Aganot) propose une évaluation précise de la valeur de votre office. Grâce à ce partenariat, votre activité sera évaluée sous différents angles : financier, comptable et structurel, afin de garantir une estimation complète et adaptée à votre secteur d’activité.
2/ Recherche et sélection d’un repreneur pour votre étude de notaire
Choisir un notaire repreneur pour son étude n’est pas une tâche aisée. En effet, il ne suffit pas de trouver un acquéreur ayant des capacités de financement solides. Il faut aussi s’assurer qu’il soit capable de garantir la continuité et la pérennité de l’office.
Le candidat à la reprise peut être un notaire déjà en exercice souhaitant étendre son activité ou bien un jeune notaire voulant s’installer. Les discussions portent sur les points suivants :
- Le prix de vente de l’office ainsi que ses modalités de paiement (apport personnel, organismes prêteurs).
- Les engagements du notaire repreneur en ce qui concerne la gestion de l’office, à savoir la gestion des employés (assurer leur maintien, éviter les perturbations, et poursuivre la politique de ressources humaines), le maintien de la clientèle (préserver les relations de confiance, éviter toute rupture de service ou confusion), et les projets de développement de l’activité du cabinet (propositions d’amélioration, d’extension des services, ou projet d’innovation pour assurer la croissance de l’office).
Attention, dans le cadre d’un office notarial exerçant sous la forme d’une société civile professionnelle ou d’une société d’exercice libéral, l’agrément des associés est nécessaire avant toute cession de parts.
3/ Dépôt du dossier de reprise de l’étude et validation par les autorités compétentes
La reprise d’un office notarial ne peut être finalisée sans l’obtention de l’agrément du ministère de la Justice. Pour cela, le notaire repreneur doit déposer un dossier complet comprenant :
- Une lettre d’intention détaillant son projet de reprise de l’étude.
- Une attestation de garanties financières.
- Un dossier démontrant son aptitude à exercer ses fonctions notariales.
Le Conseil Supérieur du Notariat (CSN) peut être sollicité par le garde des Sceaux afin de donner son avis, notamment sur les capacités professionnelles du notaire candidat. Il dispose alors d’un délai de 20 jours pour y répondre.
Le ministère de la Justice, par l’intermédiaire du garde des Sceaux, valide ensuite la reprise dans un délai de deux mois. En cas de dossier incomplet ou d’exigences supplémentaires, cette étape peut s’allonger.
4/ Signature de l’acte de cession de l’étude et prestation de serment du notaire repreneur.
Une fois l’agrément obtenu, l’acte de cession est signé devant notaire. Il formalise toutes les conditions de la cession de l’étude, notamment le prix, les modalités de paiement et les engagements des parties.
Le notaire repreneur doit ensuite prêter serment devant la Cour d’appel compétente avant d’exercer officiellement ses nouvelles fonctions au sein de l’étude. Cette prestation doit être réalisée dans le mois suivant la publication de l’arrêté ministériel, sous peine d’annulation de la cession de l’étude.
Le saviez-vous :
En cas de refus du garde des Sceaux d’agréer le notaire repreneur, il est possible de former un recours devant le Conseil d’État pour contester cette décision. Toutefois, cette démarche doit être effectuée dans un délai strict de deux mois à compter de la notification du refus.
Les implications fiscales de la transmission d’un office notarial
La cession d’une étude notariale constitue une opération complexe qui nécessite une préparation minutieuse, notamment en matière fiscale. Selon le mode de transmission retenu, les conséquences fiscales peuvent varier significativement.
Étude de cas n°1 : Cession d’une étude notariale en exercice individuel
Lors de la cession d’un office notarial exercé sous forme individuelle, le notaire cédant est imposé sur la plus-value professionnelle réalisée à l’occasion de la vente. Cette plus-value est soumise à l’impôt sur le revenu, selon la nature de la plus-value (court terme ou long terme) auquel s’ajoutent des prélèvements sociaux.
Le traitement fiscal dépend de la durée de détention de l’étude et de la nature des éléments cédés :
- Les éléments amortis (mobilier, matériel informatique…) génèrent une plus-value à court terme imposée au barème progressif de l’impôt sur le revenu.
- Les éléments non amortis de l’étude (droit de présentation, clientèle) relèvent de la plus-value à long terme, taxée à 30 %.
Toutefois, sous certaines conditions, le notaire cédant peut bénéficier d’une exonération totale ou partielle de l’imposition de la plus-value de son étude :
- Exonération en fonction du chiffre d’affaires (article 151 septies du CGI)
Si le chiffre d’affaires moyen de l’étude des deux dernières années est inférieur à 90.000 €, la plus-value est exonérée en totalité.
Si le chiffre d’affaires de l’étude est compris entre 90.000 € et 126.000 €, l’exonération est partielle.
- Exonération en cas de départ à la retraite du notaire cédant (en application de l’article 151 septies du CGI)
Pour bénéficier d’une exonération totale, le notaire doit cesser son activité au sein de l’étude et liquider sa retraite dans un délai de 24 mois avant ou après la cession de son étude.
Les prélèvements sociaux restent cependant exigibles.
Le notaire acquéreur doit s’acquitter quant à lui de droits d’enregistrement calculés selon le barème suivant :
- Aucun si le prix de vente de l’étude est inférieur ou égal à 23.000 €.
- 3 % pour la fraction du prix comprise entre 23.000 € et 200.000 €.
- 5 % pour la fraction excédant 200.000 €.
Il est donc essentiel pour le notaire repreneur d’anticiper ces coûts dans son plan de financement.
Étude de cas n°2 : Cession des titres d’une société notariale
Cession des titres d’une société notariale soumise à l’IS (SELARL, SELAS, etc.)
La cession des parts ou actions d’une étude de notaire soumise à l’IS entraîne une plus-value mobilière, qui est imposée (par défaut) par une Flat tax de 30 % (Prélèvement Forfaitaire Unique, PFU).
Uniquement si les titres ont été acquis avant le 1er janvier 2018, l’imposition sera fonction du barème progressif de l’IR : abattement de 50 % après 2 ans de détention ou abattement de 65 % après 8 ans de détention.
- Cession des titres d’une société notariale soumise à l’IR (SCP) :
La cession des parts d’une étude sous la forme d’une SCP (soumise à l’IR) entraîne une plus-value professionnelle (et non une plus-value mobilière) imposée à 30 % pour la plus-value à long terme ou selon le barème progressif de l’IR pour la plus-value à court terme (si les parts sont détenues depuis moins de 2 ans).
L’étude en SCP étant fiscalement transparente, la plus-value n’est pas imposée au niveau de la société mais directement au niveau des associés.
Pour les études soumises à l’IS et l’IR des exonérations sont également possibles, en fonction du chiffre d’affaires (sous les conditions précédentes) et en cas de départ à la retraite si vous cédez l’intégralité de vos parts sociales.
Le repreneur doit quant à lui d’acquitter des droits d’enregistrement s’élevant à 0,1 % du prix de cession pour une SELARL ou une SELAS, et 3 % après abattement de 23 000 € pour une SCP.
Comme le rappelle Alexandre Panossian, CEO du Cabinet Bontemps, “plusieurs stratégies peuvent être mises en place pour optimiser la fiscalité lors de la cession d’une étude notariale.” En voici quelques exemples :
– Création d’une holding : apporter les titres de l’étude à une holding permet de bénéficier, sous certaines conditions, d’un report d’imposition de la plus-value. Cette structure offre également une flexibilité accrue pour la gestion du patrimoine professionnel et personnel.
– Pacte Dutreil : en cas de transmission familiale d’une étude, ce dispositif permet une exonération partielle des droits de mutation à hauteur de 75 % de la valeur des titres transmis, sous réserve de respecter certains engagements de conservation et de direction.
La transmission ou l’acquisition d’une étude notariale représente un défi complexe pour les notaires, tant sur le plan juridique que fiscal. Pour garantir une cession réussie de votre étude notariale, il est essentiel de bien l’évaluer, de négocier les termes de la vente et de bien comprendre les implications fiscales de cette opération.
Vous craignez de commettre des erreurs ou de ne pas sécuriser juridiquement la transaction ? Le Cabinet Bontemps, spécialisé dans la transmission d’études notariales, est là pour vous fournir des informations précieuses et des conseils personnalisés. N’hésitez pas à nous contacter.